La semaine dernière dans le groupe Facebook que j’ai créé pour parler de bienveillance et de pédagogie Montessori, un des membres du groupe a partagé un article d’une maman qui arrivait à ce constat : la pédagogie Montessori n’est pas faite pour son fils. Elle en conclut donc que certains enfants s’adapteraient à la pédagogie Montessori, et pour d’autres, ce système ne leur conviendrait pas.
Moi-même, j’ai longtemps pensé la même chose.
Sûrement parce qu’un jour, une formatrice très connue m’a dit que sur les deux filles qu’elle avait eues, l’une d’entre elles ne s’était jamais épanouie dans l’école Montessori qu’elle fréquentait. J’avais pris ça pour argent comptant. Et moi-même, j’ai vu des élèves qui ne « s’adaptaient » pas. Ma croyance a donc été renforcée. Il y a des enfants qui sont faits pour Montessori et pas d’autres.
Les années ont passé, j’ai vécu des situations dans ma vie personnelle qui m’ont fait me remettre en question sur pratiquement tous les aspects de ma vie. Je me suis formée en bienveillance, en accompagnement et guidance parentale, en psychologie de l’enfant. Et un jour j’ai compris. J’ai compris que je m’étais trompée, comme beaucoup.
En fait, le secret, c’est que l’enfant n’a JAMAIS à s’adapter à la pédagogie. Qu’elle soit Montessori, Waldorf, traditionnelle ou autre. Le propre de la bienveillance, c’est d’observer et de comprendre l’enfant pour lui offrir un cadre qui correspond à ses besoins et son processus d’apprentissage. C’est là que j’ai relu Maria, et que j’ai compris que cela a toujours été son message : la méthode doit se baser non pas sur des considérations extérieures (les choix de l’adulte, le dogme pédagogique) mais sur la connaissance des lois naturelles du développement de l’enfant, sur ses processus d’apprentissage et sur son type d’intelligence. Observer l’enfant, lui proposer une méthode adaptée (même si le matériel en question n’est pas estampillé Montessori)… on pourrait dire alors que la pédagogie Montessori ne se suffit pas à elle-même puisqu’il faut ajouter du matériel supplémentaire. Je réponds : SI ! Parce que la pédagogie Montessori ne se résume pas à son matériel. C’est d’avantage une posture, un lien bienveillant, une connaissance de l’enfant et de son fonctionnement… le matériel n’est qu’une clé sur le monde, un moyen pour arriver à un objectif. Ce n’est jamais l’objectif. Jamais. Et parce que Maria Montessori a bien précisé: rien n’est figé, continuez après moi !
L’enfant n’a jamais à s’adapter à la pédagogie Montessori. Le propre de la pédagogie c’est que ce soit l’adulte qui s’adapte. Il y a des enfants qui gèrent très bien cette grande liberté qui leur est offerte. D’autres qui ont besoin d’être accompagnés pour apprendre à faire des choix et être autonomes. Il y a des enfants qui travaillent seuls spontanément. D’autres qu’il faut inciter, avec lesquels il faudra passer des contrats et adapter progressivement ces contrats pour les supprimer un jour.
Le souci n’est donc pas que la pédagogie Montessori n’est pas faite pour tous les enfants, mais que toutes les écoles Montessori ne sont pas faites pour tous les enfants. C’est une question de compréhension de la pédagogie, de l’enfant, et une volonté de s’adapter aux particularités de chacun.
Si la pédagogie Montessori était une méthode, elle ne serait pas adaptée à tous. C’est le propre d’une méthode. Mais Montessori n’est pas une méthode. C’est une philosophie de vie qui nous invite à une profonde connaissance de l’enfant. Connaissances mises à jour par Maria Montessori et validées depuis une dizaine d’années par les neurosciences.
Montessori n’est ni une mode, ni une méthode. Et tous les enfants sont adaptés à la pédagogie Montessori, puisque en réalité, c’est la pédagogie Montessori qui s’adapte à chacun.
Merci pour ces partages qui sont toujours un enrichissement.
Bien à vous
Sandra
Tres bel article. Un grand merci.
Mes debuts en classe avec Montessori me destabilisent, je me sens perdue sans reperes.
Cet article donne vraiment un cap à ne pas perdre de vue.
Vraiment merci
Merci. Vous avez parfaitement raison et c’est tout aussi valable pour la pédagogie Freinet : ce ne sont pas des méthodes mais un même respect de l’enfant avec des outils différents : c’est l’enfant qui détermine ce qui est bon pour elle.lui ! En pédagogie Freinet l’enseignant.e est à l’écoute et suit la démarche de l’enfant aussi incompréhensible peut-elle lui paraître de prime abord et cela donne des résultats étonnants car l’enfant a toujours une bonne raison d’agir comme il.elle le fait. C’est aussi le point de vue de Maria Montessori pour laquelle le matériel est un outil au service de la logique de l’enfant : c’est au maître à s’adapter à celle-ci et non l’inverse !
Maintenant, à travers tout ce que j’ai vu – en particulier « une journée dans la classe de Sophie » pour Freinet et » le maître est l’enfant » pour Montessori, il me semble qu’une formation à la gestion des conflits façon Thomas Gordon (ou la lecture de son livre « enseignant efficace ») serait nécessaire pour mieux comprendre ce qui se joue entre les enfants qui est extrêmement rarement l’interprétation qu’en font les adultes qui n’ont pas la même logique.
Par exemple dans le film « le maître est l’enfant » lorsque l’enseignant reprend d’autant plus vertement le garçon qu’habituellement il est compréhensif en lui disant qu’il n’avait pas à dire à la fille que son dessin n’était pas beau cela paraît pertinent (et cela le serait si le garçon avait été un adulte) cependant il avait pu mener la discussion d’une façon qui lui aurait peut être permis de comprendre que l’esthétique du dessin n’était pas le problème mais le symptôme d’un autre conflit que, du coup, son intervention n’a pas permis de régler.
Et dans le film « Une journée dans la classe de Sophie » il me semble aussi qu’il y aurait eu une autre façon de permettre aux enfants de régler leur conflit avec le gamin Africain.
Pour moi c’est l’esprit d’empathie à l’égard des enfants – surtout quand ils sont en difficulté relationnelle qui fait le cœur (dans tous les sens du terme de ces pédagogies.
Bonjour Danielle
Je vous remercie pour votre commentaire. Nous sommes d’accord que la gestion de conflits et la recherche de la satisfaction des besoins de l’enfant sont primordiales dans ce genre d' »ambiances » pour rester bienveillant. Au plaisir d’échanger avec vous! 🙂
Victoria
Bonjour!
Je suis tout à fait d’accord sur le fond, mais je voudrais rajouter quelques petites choses: en ce qui me concerne, je n’utilise même plus le terme de pédagogie (et pourtant, je suis prof!) car ce terme induit que l’adulte réfléchit à comment faire apprendre quelque chose à l’enfant. Cela met donc encore l’adulte au centre alors qu’il s’agit de l’enfant. Pas besoin de pédagogie! L’enfant est libre et c’est lui qui dirige sa vie, et donc, ses apprentissages. Bien sûr, cela signifie un environnement riche et naturel (dans le sens de « contraire d’artificiel »). Dans cette vision, le matériel pédagogique devient superficiel, d’ailleurs, les enfants le délaissent car il est bien plus naturel et excitant d’apprendre dans le monde.
Nous sommes en unschooling total et mon expérience (qui est nouvelle pour nous) est fascinante chaque jour. Il suffit de faire confiance à l’enfant. C’est lui qui sait ce qui est bon pour lui et à quel moment. C’est une philosophie de vie qui implique un chamboulement dans nos relations à l’enfant mais également à autrui et à la planète. C’est une vision humaniste, un respect et une confiance totale. Et pour le coup, cette posture ne convient pas seulement à TOUS les enfants, mais à TOUS les êtres humains.
Merci pour cet article dont je partage entièrement les idées.
Quand on me pose la question « cette pédagogie convient-elle à tous les enfants? », je réponds souvent également: « Oui, mais elle ne convient pas forcément à tous les parents. » Car même si l’éducateur fait tout ce qu’il faut pour s’adapter, si le parent pose trop d’attentes sur son enfant, cela ne fonctionnera pas non plus…
Mon fils est en ecole Montessori depuis 2 ans. Convaincue par la bienveillance de l’équipe pedagogique, par le rythme scolaire, par les activités et surtout par la philosophie Montessori, je remarque que je le perd. Il « papillone » beaucoup, ne se concentre sur rien, les activités ne l’intéresse plus ou très peu, son comportement change également il cherche les limites des enseignants, mais aussi des autres enfants, j’ai le sentiment qu’il est perdu qu’il a du mal à trouver un cadre qui lui correspond. J’etais et je suis convaincue par la philosophie Montessori, mais je pense le changer d’ecole et le mettre dans une ecole « classique » mais j’ai tres peur que le changement de cadre, le manque d’autonomie, et toutes ces petites différences le pertube d’autant plus… avez vous des avis? Des experiences vecues? Merci bcp
Bonjour Nathalie,
J’ai trop peu de renseignements pour vous donner une ou plusieurs pistes plausibles, mais voici mes réflexions.
Votre enfant change et grandit. Ses besoins (notamment de sécurité et de cadre) changent également. Cela ne veut pas forcément dire que l’école ne lui convient plus, mais qu’il cherche tout simplement à se positionner. La place qu’il occupe au sein de l’école change constamment et il a besoin de se repositionner par rapport à cela.
Ensuite, vous dites qu’il papillonne. Cela peut être tout à fait normal, même pendant une période qui semble longue (plusieurs semaines, plusieurs mois). Il est important de le laisser papillonner, à condition bien sûr que l’environnement soit suffisamment riche (et donc se poser des questions, notamment quelles sont ses périodes sensibles afin de venir apporter du matériel qui serait susceptible de l’intéresser. Est-ce que l’école est dans cette posture? Car si elle reste sur le matériel uniquement présent en classe, cela risque de ne pas lui suffire, et donc de provoquer lesdits comportements).
Je ne pense pas que le changer d’école soit la solution. Ce qui me semblerait important, c’est que l’équipe, après une observation importante, apporte des changements significatifs dans l’environnement, et teste afin de savoir sur quoi se pose son attention… le but n’étant pas que ce soit l’enfant qui s’adapte au cadre pédagogique, mais que ce cadre soit bel et bien adapté à ses besoins.
Belle soirée
Victoria
Merci Victoria pour cet excellent article riche en rappel.
À bientôt…
Bonjour,
Je vous écris car je suis maman d’un petit garçon de 3 ans et demi qui fréquente une école montessorî depuis septembre dernier, après avoir été gardé exclusivement à la maison par son père, moi même ou ma mère, et il ne s’y plait pas du tout. Il est très angoissé à l’idée d’y aller, les éducatrices me disent qu’il pleure plusieurs fois par jour, il s’accroche encore à moi le matin, il fait des cauchemars, n’en parle jamais avec grand plaisir et enthousiasme mais plutôt pour soulever des problèmes, etc … cela fait pourtant 5 mois maintenant … ça allait un peu mieux avant les vacances de noël et ca a repris de plus belle a la rentrée …. j’ai l’impression que le rythme est en cause : il semble angoissé et le verbalise a l’idée de passer là journée entière la bas, il me dit qu’il veut bien faire des activités mais qu’il faut aller le chercher après les activités, c’est a dire quand l’heure de la cantine, de la sortie au parc etc arrive … il se plaint que c’est trop long …. je sais qu’en Montessori on demande aux enfants de rester des journees entières alors que dans beaucoup d’ecoles Traditionnelles, le mi temps est complètement accepté … ou alors la pédagogie Montessori ne lui convient pas ? Il participe à des ateliers créatifs et à des cours de théâtre d’une heure, 1h30 et là il semble heureux et en redemande … qu’en pensez vous ? D’autres Mamans ont elles rencontré le même problème ? Merci de m’avoir lue, Karen.
Je me rends compte en le relisant que mon message est très négatif, sûrement a cause de la déception que je ressens que ça ne marche pas si bien que ça, et de l’inquiétude de voir mon enfant malheureux ces derniers temps. Je vais quand même l’adoucir un peu en rajoutant que c’est surtout depuis la rentrée de janvier donc 2-3 semaines que cette situation est apparue. Avant les vacances de noël, comme je le dis plus haut, il s’y était fait, il n’etait Pas d’un enthousisiasme fou, mais ne pleurait quasiment plus et semblait partager plus d’activites Avec les enfants de sa classe (via les photos postées par l’ecole Sur leur site, je le voyais participer). Maintenant il n’apparait Plus du tout sur les photos car il est a part sur une chaise ou à lire des livres dans un coin et pleure donc comme je vous l’ai déjà raconté (et la je n’ai pas dramatisé du tout). Voilà merci encore pour votre aide et vos conseils …
Bonjour Karen,
Il n’y a aucune obligation de journées entières en école Montessori. C’est sûr, la régularité compte. Par exemple, venir tous les matins me semble indispensable pour l’intégration des règles mais aussi que l’enfant ait suffisamment de possibilités d’exploration. Le fait que votre fils soit fatigué peut jouer sur son manque de motivation.
Je ne pense pas que Montessori ne lui convient pas. Je ne remettrai pas l’école en cause non plus, car je ne la connais pas et que j’ai trop peu d’éléments à ma disposition pour pouvoir émettre un jugement. Vous pouvez par contre entrer en dialogue avec les éducatrices pour leur parler de son mal-être, lors d’un entretien par exemple. Cela vous permettrait aussi de voir ce qui est mis en place et ce qui pourrait l’être.
J’irai aussi chercher auprès de votre petit garçon ce que ce manque de motivation signifie pour lui. Quel est le message codé en gros. Par exemple, est-ce qu’il s’est passé qqch à la maison récemment, qui ferait qu’il préfèrerait rester avec vous? (Ce n’est pas forcément quelque chose de « dramatique » d’ailleurs). J’essaierais aussi l’empathie pour son manque de motivation… mais quoi qu’il en soit j’irais creuser avec lui!
N’hésitez pas à me tenir au courant de la suite!
Victoria
Pour avoir travaillé un certain temps dans une garderie Montessori, c’est irréaliste de dire que ça convient à tous les enfants. Certains petits ne cadre pas avec les principes de Montessori et il faut être l’accepter sinon l’enfant est effectivement très malheureux. Je vous conseil d’écouter votre cœur de maman Chartiel. Vous savez ce qui est bon pour votre enfant. Par exemple, si votre enfant a beaucoup d’imagination, de créativité et donc a un côté artistique très fort, vaut peut-être mieux chercher une autre option pour lui. C’est mon opinion personnelle.
Votre commentaire, Lucille, me laisse perplexe…
Déjà, parce qu’un enfant n’a pas à « cadrer » avec une quelconque pédagogie. La base de la base, surtout dans une vision ouverte de l’éducation, c’est que l’enfant est respecté et accompagné. Il n’a pas à « cadrer » avec une méthode employée… si, mais alors cela s’appelle l’école publique.
Ensuite, la « garderie » Montessori dans laquelle vous travailliez ne devait pas à mon sens respecter les critères essentiels de la pédagogie… sinon je pense que vous auriez eu une autre expérience. Car, et heureusement!!!, des écoles Montessori qui s’adaptent aux enfants, cela existe.
Enfin, permettez-moi de m’interroger sur le fait que vous puissiez penser que la pédagogie Montessori ne respecte pas ou ne favorise pas la créativité des enfants… car c’est tout l’inverse! Avez-vous suivi une formation durant votre expérience là-bas?
Je pense qu’il est important de différencier ce qui se pratique dans certains établissements, et le fondement de la pédagogie.
Ce n’est pas illusoire de dire que la pédagogie Montessori convient à tous les enfants. Par contre, je suis d’accord: toutes les écoles ou « garderies » Montessori ne sont pas adaptées à tous les enfants… c’est différent. C’est même toute la différence.