ou comment choisir les livres pour un enfant d’après la pédagogie Montessori (et les lois naturelles du développement de l’enfant)

La littérature enfantine regorge aujourd’hui d’albums, d’imagiers et d’histoires pour les tout-petits. Nous pouvons y retrouver, par exemple, des histoires de loups, de sorcières ou de monstres divers, ou alors d’autres récits entrés aujourd’hui dans la normalité des albums jeunesse avec un renard en jean qui joue de la guitare, une souris qui se demande ce qu’il y a dans sa couche, un lapin en salopette qui joue avec son train, un ours déguisé qui fait la fête, qui joue en étant sur le pot ou qui a peur dans son lit… Vous allez me dire, mais où est le problème? Il est mignon, Calinours avec sa cape de magicien… Oui, mais voilà.

Maria Montessori a découvert que jusqu’à l’âge de 8 ans environs, l’enfant est dans une phase que l’on appelle « esprit absorbant ». L’esprit absorbant, c’est l’image de l’éponge qui se gonfle dans l’eau. L’enfant s’approprie son environnement inconsciemment et sans effort. C’est un phénomène étonnant qui présente beaucoup d’avantages: l’enfant apprend sans s’en rendre compte et très facilement et simplement. Mais il ne fait pas de distinction et absorbe tout, sans distinction. En parallèle de cet esprit absorbant, l’enfant jusqu’à 6 ans environs est dans une pensée intuitive, cela veut dire qu’il ne fait pas la différence entre la réalité et la fiction. Pour lui, tout est réel, le loup qui vient chercher le petit chaperon rouge comme le monstre rouge de la grosse colère. Nous pouvons observer dans la vie quotidienne de l’enfant, notamment dans les petits (ou gros) « mensonges », dans les peurs (du noir, des monstres sous le lit, des sorcières…) ou la pensée « magique » (si je saute à cloche-pied sur les dalles en diagonale, il se passera…). L’enfant est, à ce moment-là, dans l’imaginaire, dans une pensée dite « pré-logique » ou « intuitive » donc. Notre rôle est de lui apporter l’aide nécessaire pour comprendre ce monde dans lequel il évolue et sortir, lorsque cela sera le bon moment pour lui, de l’imaginaire pour entrer dans l’imagination. Ce passage se fait vers l’âge de 6 ans, quand (et comme les neurosciences nous l’ont montré) le cerveau pensant (néo-cortex) devient efficace: l’enfant devient alors capable de prendre du recul sur ses émotions, d’atteindre l’abstraction (dans ses apprentissages et sa compréhension des choses).. et de comprendre la différence entre la réalité et le « pour de faux ».

Si nous maintenons l’enfant dans l’imaginaire, il risquera d’avoir des difficultés à en sortir véritablement, et de construire son imagination (qui n’a pas besoin d’imaginaire pour se créer). Au lieu de lui proposer des livres contenant des histoires inventées par les adultes, donnons-lui donc des histoires réalistes qui l’aideront à construire sa vision du monde. Des ours, des lapins, des souris et des renards qui vivent leur vie d’animaux. Et il faut tout de même l’avouer: nous n’avons jamais croisé d’oursonne en tablier à fleurs dans le rayon surgelé de notre supermarché. 🙂

Proposer des livres réalistes à un enfant va lui permettre de s’ancrer dans des principes de réalité qui l’aideront à passer de l’imaginaire à l’imagination. Quand ce passage ne se fait pas, et dans les cas les plus extrêmes heureusement très rares, l’enfant peut se mettre en danger (par exemple, un petit garçon qui se prend pour Superman et saute du balcon en costume, persuadé qu’il peut voler). Bien sûr, ce n’est pas parce qu’un enfant a lu Petit Ours Brun qu’il sautera du balcon mais je vous donne cet exemple car il m’a personnellement beaucoup frappée.

Mais alors, quid des contes, de Disney, des histoires fantastiques ?  Vers 6 ans et lorsque l’enfant est passé de l’imaginaire à l’imagination grâce à l’efficacité du néo-cortex, nous pouvons lui proposer des contes, car il saura profondément que ce sont des fables, des histoires « pour de faux » et que c’est de la fiction. Avant cet âge, restons au réel… et patientons pour aller visiter le château de la belle au bois dormant!

Si vous souhaitez tester quelques livres réalistes, voici une petite liste (non exhaustive). Et n’hésitez pas à laisser un commentaire pour proposer d’autres chouettes références!

Livres ancrés dans le réel:

  • On range!, Eve Herrmann et Roberta Rocchi
  • Emy et les tournsols, Eve Herrmann et Roberta Rocchi
  • Bonne nuit mon tout petit, Soon Hee Jeong
  • Où va l’eau?, Jeanne Ashbé
  • Bonjour!, Jeanne Ashbé
  • La chasse à l’ours, Michael Rosen et Helen Oxenbury
  • Ne bouge pas, Komako Sakai
  • Un amour de ballon, Komako Sakai
  • Le bateau arrive, Yuichi Kasao
  • Sur ma tête, Emile Jadoul
  • Ma maman a besoin de moi, Mildred Pitts Walter
  • Y a-t-il des ours en Afrique?, Satomi Ichikawa
  • Maman je m’ennuie, Keiko Kanao
  • Petit chaton a des ennuis, Keiko Kanao
  • Sur les genoux de maman, Ann Herbert Scott
  • Jour de ménage pour Mimosa, Jennifer Dalrymple
  • Mimosa blanc bonhomme, Jennifer Dalrymple
  • Mimosa croque noisettes, Jennifer Dalrymple
  • Mimosa, tartine et pollen, Jennifer Dalrymple
  • L’imagier du Père Castor
  • Toute la collection « Mes premières découvertes »